Soul | Une âme soulagée

par Mystic-Falco

Alors que les conditions sanitaires ont bouleversé tous les plans de sortie cinématographique de l’année, certaines sociétés, qui plus est celles ayant des services de SVOD, en profitent pour sortir malgré tout leurs œuvres sur leurs plateformes de vidéo à la demande. Nous ne reviendrons pas sur la question quant à savoir si cela est positif ou pas, mais selon moi, il est clair que ce moyen de diffusion tue l’industrie des salles de cinéma. Quand on voit que les multiplexes se trouvent être en difficulté, je ne préfère malheureusement pas imaginer ce qu’il en est pour les petits cinémas de quartier…

Quoi qu’il en soit, le groupe Disney, de toute sa puissance qu’il a acquise au fil des années, se retrouve être l’un des pionniers de ce système de diffusion. Mettre leurs nouveaux films directement sur sa plateforme de SVOD, à savoir Disney +. Tout cela bien-sûr, sans passer par la case cinéma. Entre les tollés d’Artemis Fowl et Mulan, dont vous en avez forcément entendu parler, nous n’espérions plus grand chose des sorties hors cinéma de studio. Cependant, il faut bien l’avouer, Soul, la dernière production des studios Pixar, se trouve être la perle rare que l’on attendait tous après ces différents échecs.

Le film de la maturité

Il faut le dire, depuis maintenant 25 ans, Pixar Animation Studios n’a de cesse de nous émouvoir, grâce à des longs-métrages extrêmement bien maîtrisés. Bien évidemment, certains font exception à cette règle, je pense notamment aux films « Le Voyage d’Arlo » ou encore « Toy Story 4 » (n’en déplaise à certains !). Mais une chose est sûre, les réalisations de Pete Docter font mouche à chaque fois ! Que ce soit avec Monstres & Cie, Là-Haut ou encore Vice-Versa, ce bonhomme tape fort à chaque fois et sa dernière création, Soul, suit le même chemin.

© Soul, Disney Pixar

Soul, est un film d’animation du Studio Pixar, réalisé par Pete Docter, et est sorti le 25 décembre 2020 sur Disney +. Nous suivons la vie de Joe Garner, un professeur de musique au collège, rêvant de jouer du Jazz sur scène. Alors que son rêve est en passe de se réaliser, un accident quasi-mortel provoque la scission entre son corps et son âme. C’est ainsi qu’il fera la rencontre de 22, une âme n’ayant pas encore eu l’occasion de vivre sur Terre, et surtout ne voulant pas y vivre, tant la vie en tant que telle lui fait peur.

Habituellement, les longs-métrages du studio s’adressent le plus souvent aux plus jeunes avec évidemment un second niveau de lecture, parlant ainsi bien plus aux adultes que nous sommes, qu’aux plus petits, ce qui participe d’ailleurs à la renommée du studio. Cependant, pour la première fois, j’ai l’impression que le studio s’adresse directement aux adultes que nous sommes devenus. Les différents messages du films étant bien plus des préoccupations d’adultes que d’enfants, cela provoque indubitablement une projection plus forte pour le spectateur. Entre les choix de carrières raisonnables et déraisonnables, les convictions que l’on croit être bonnes qui ne le sont pas toujours et enfin la dépression, clairement les messages de ce film sont loin d’être évidents à comprendre pour les plus jeunes.

Bien évidemment, il y a toujours quelques scènes de gag pour que les enfants puissent s’y retrouver, mais dans l’ensemble je ne les ai pas du tout trouvées invasives. Mieux encore, elles permettent d’alléger un peu le propos du film, ce qui est loin d’être désagréable.

De la perdition à la lumière

Les propos de Soul sont donc d’une maturité à tout épreuve. Dans un premier temps le film se concentre sur les convictions qui font de nous les êtres que nous sommes. Il s’attarde plus particulièrement sur les convictions que l’on se crée, et non pas celles qui sont importantes dans la vie. Joe, le personnage principal, est convaincu qu’il est fait pour être jazzman. Il ne vit que pour la musique au point où il s’oublie totalement, tant les convictions qu’il s’est créées font partie intégrante de sa vie. À plusieurs reprises il est question d’une relation qu’il pourrait vivre, une relation avec une certaine Lisa. Lui-même dit « Je n’ai pas le temps pour vivre ce genre de chose ».

© Soul, Disney Pixar

Un autre point qui montre l’aveuglement de Joe face au monde qui l’entoure est donné avec le coiffeur Dez, qui lui explique qu’être coiffeur n’était pas sa vocation à la base ; lui voulait être vétérinaire, et juste pour une question de coût des études, malheureusement, il a du se rabattre sur la coiffure. Cependant, ça ne l’empêche pas d’aimer ce qu’il fait ; au contraire même, il est très content de sa vie. Par le biais de cette conversation, et par le fait que le coiffeur lui dise qu’il est heureux d’avoir pu partager ça avec lui, car il ne lui avait jamais demandé avant, Joe prend deux leçons de vie en l’espace d’une séquence. À savoir que les convictions que l’on se crée ne sont pas forcément notre but de vie. On peut aussi se satisfaire de ce que l’on a et en être très heureux, tant que nous sommes en accord avec nous-même et nos propres principes. Mais également, savoir s’ouvrir aux autres, et ne pas rester ainsi obnubilé par nos propres objectifs, car nous passons à côté de beaucoup, et notamment de la vie elle-même.

Le film arrive encore à surprendre le spectateur dans son dernier acte, en parlant des âmes en perditions. Un sujet assez délicat à aborder dans un film d’animation, tant l’allégorie est évidente : il s’agit de la dépression en elle-même.

La personnification des âmes en perditions est vraiment très significative. Alors qu’une jeune âme prête à vivre ressemble à une petite boule de couleur pleine de vie, la dépression est quand à elle représentée par un être difforme, sombre, et dont on sent tout le poids qu’il représente. La créature en question ne fait que tourner en boucle, ressassant ainsi les idées sombres et autres qui font que l’âme s’est perdue en chemin. Heureusement, le film est assez intelligent pour montrer qu’il est possible de sortir de cet état de morosité complète.

C’est sur ce dernier point que je me permets de m’arrêter un instant. Comme vous pouvez le voir, cet article est le premier que j’écris réellement pour Pod’Culture. J’ai traversé une période de ma vie très loin d’être évidente et il s’avère que j’en ai perdu tous mes repères, tous mes moyens. Je me suis complètement perdu, au point même ou j’en suis venu à ne plus comprendre ce que je faisais ici. Soul, fait parti de ces électro-chocs que l’on se prend dans la vie. Ces œuvres qui résonnent en nous, au bon moment, et dont nous aimons vous parler ici, tant le partage de la culture est importante pour nous. Entre le fait de se rendre compte que l’on peut passer à côté de sa vie, et d’autant plus lorsque l’on se laisse sombrer dans la dépression, le nouveau long-métrage de Pete Docter vient nous rappeler gentiment à l’ordre. Évidemment je ne dis pas que le film a fait tout le travail pour moi. Cependant, il est clair qu’il a eu un écho profond, au point où, sur tous les sujets qu’il aborde, je me suis pleinement retrouvé.

Si tout comme moi, l’âme en perdition peut avoir un écho en vous, je vous invite à découvrir Soul. Plus que ça encore, je vous invite à découvrir la filmographie de Pete Docter, tant les longs-métrages qu’il a réalisés possèdent de très beaux messages sur la vie en général, sans être moralisateurs. Ne passez pas à côté de Soul, tout comme ne passez pas à côté de votre vie car, indubitablement, vous passerez à côté de quelque chose de grandiose. Profitez des petits instants simples de la vie, plutôt que de se prendre la tête à vouloir être dans le contrôle constant.

  • Soul est disponible depuis le 25 décembre 2020 sur Disney +.

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