Golden Guy – Tomes 3 et 4 | Un homme sans peur

par Anthony F.

Les débuts de Golden Guy étaient plutôt convaincants. On y découvrait un manga de gangsters aux bonnes références, avec une galerie de personnages plutôt intrigante et un fil conducteur autour d’un trésor caché qui donnait très clairement envie d’en savoir plus. Mais alors, est-ce que Jun Watanabe continue sur la même voie avec ces deux nouveaux tomes ?

Cette critique a été écrite suite à l’envoi d’un exemplaire du tome 3 par l’éditeur.

Une traque sans lendemain

© Jun Watanabe (NIHONBUNGEISHA)

Une chose est sûre, c’est que Jun Watanabe a des idées. Il ne faut pas attendre bien longtemps pour déjà trouver un grand moment pour Golden Guy, puisque dès le tome 3 on assiste à une vraie maîtrise sur sa narration qui fait considérablement progresser la qualité du manga. Si les deux premiers tomes étaient tout à fait sympathiques, ils n’avaient pas encore ce petit plus qui distingue les lectures tout juste agréables et les vrais bons moments. Dans ce tome, l’auteur raconte la folie tueuse d’un yakuza qui, prêt à tout perdre, se met en route pour tuer un à un chaque chef de clan afin de pouvoir débusquer le parrain de l’organisation. Une quête sanguinaire qui l’amène à des exécutions sommaires, jusqu’à un grand final au milieu de la foule qui s’avère particulièrement réussi. Entre la tension ambiante du tome qui se lit à toute vitesse pour vite découvrir la suite et le dénouement, mais aussi grâce à sa narration très intense, sans concession, avec une mise en scène qui comprend tout l’intérêt d’une telle traque, l’auteur fait entrer son récit dans l’urgence avec beaucoup de talent. Et ce après deux premiers tomes qui ont pu, de manière plus posée, expliquer les enjeux et les ambitions des différents personnages.

Mais malheureusement, l’intrigue se perd un peu plus dans le tome 4. Avec quelque chose de plus étriqué, moins ambitieux, plus terre à terre mais aussi moins captivant. Le manga tente de jouer une partition plus émotive sans se laisser le temps de raconter ses personnages, cherchant à choquer et à émouvoir avec la disparition de certains personnages secondaires qu’on n’a pas eu le temps de connaître, de comprendre et d’apprécier pour ressentir quoique ce soit face à leur mort. C’est un peu comme si Jun Watanabe avait abordé trop vite et trop tôt un arc de vengeance pour le héros sans donner aux lecteur·ices les clés nécessaires à la compréhension de ses choix. Comme s’il abordait son récit et sa narration sous un angle purement technique en oubliant que Golden Guy, comme tout récit dramatique, a besoin de créer un lien entre nous et ses personnages et leur destin pour que l’on ai la moindre réaction face à leurs échecs et leur perte. Cela n’en fait pas une mauvaise lecture pour autant, mais

Yakuza ramolli

© Jun Watanabe (NIHONBUNGEISHA)

Ce quatrième tome interroge sur les ambitions narratives de Jun Watanabe, qui s’approche de la conclusion de son premier arc (qui devrait prendre fin au tome 5) mais qui, pourtant, peine à trouver son rythme malgré le coup d’éclat du troisième tome. On ne va pas enterrer Golden Guy dès maintenant, parce que malgré tout, ça reste une lecture assez agréable pour peu qu’on le prenne pour ce qu’il est, quelque chose d’assez léger et sans prétention. Néanmoins, si le manga doit durer dans le temps, il faudra qu’il trouve le point de rupture pour le faire entrer dans quelque chose de plus ambitieux, plus précis aussi dans ses intentions. Chose qu’il tente quand même mine de rien avec le quatrième tome qui insiste sur l’urgence de la situation, la vengeance du héros et le côté « désespéré » de la situation. Mais il ne parvient pas encore à capter l’humanité sous-jacente de telles situations, rendant l’urgence et l’inquiétude assez secondaire, m’empêchant de me sentir véritablement concerné par ce que le manga me raconte. Et c’est pas faute d’avoir eu un avis tout à fait positif dès le début du manga.

C’est toujours un peu compliqué d’écrire la critique d’un manga comme Golden Guy. D’un côté, la lecture n’a pas été désagréable, bien au contraire, néanmoins quand on en lit beaucoup et qu’on commence à être habitué aux codes du genre auquel le récit appartient (celui des mangas de gangster) on finit par espérer un peu mieux qu’une lecture « pas désagréable ». Les deux premiers tomes de Golden Guy laissaient espérer quelque chose d’assez solide, et le tome 3 est même superbement réalisé. Mais quand on regarde l’ensemble de ces quatre premiers tomes, on s’aperçoit assez aisément qu’il manque un supplément d’âme, un petit quelque chose en plus qui puisse pleinement nous emmener avec lui émotionnellement, et ce pour enfin pouvoir offrir de grands moments. Alors je vais évidemment persévérer en espérant que la suite trouve enfin sa voie, mais Jun Watanabe a encore beaucoup à faire pour permettre à son manga d’entrer dans la cour des grands.

  • Les tomes 3 et 4 de Golden Guy sont disponibles aux éditions Mangetsu.

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