Yakuza Reincarnation – Tome 1 | Gangs of Fantasy

par Anthony F.

Yakuza Reincarnation figure en bonne place au rayon des curiosités. Le nouveau manga de Hiroki Miyashita (Monju) et de Takeshi Natsuhara (Kurosagi) débarque avec une promesse : raconter un yakuza, l’un de ces mafieux japonais, qui se retrouve du jour au lendemain dans le corps d’une femme dans un monde alternatif très orienté fantasy. Un mélange des mondes qui provoque de nombreux quiproquo et qui sert de point de départ à une œuvre qui, très clairement, peine à se lancer.

Cette critique a été écrite suite à l’envoi d’un exemplaire par l’éditeur.

Découverte du nouveau monde

NINKYO TENSEI-ISEKAI NO YAKUZA HIME- © 2020 Hiroki MIYASHITA,Takeshi NATSUHARA /SHOGAKUKAN

Dans la plus pure tradition des isekai, c’est-à-dire des œuvres où un personnage est transporté dans un monde parallèle, Yakuza Reincarnation joue sur la naïveté d’un héros largué par un monde qu’il découvre en même temps que les lecteur·ice·s. Ici le héros, un vieux yakuza cassé de partout, est devenu une femme, princesse d’un monde de fantasy qui est pleine d’énergie. Pourchassée par des orcs, elle est vite rejointe par ses compagnons qui sentent vite qu’elle n’est plus elle-même. Alors évidemment, l’humour est omniprésent et joue beaucoup sur la dualité entre le ton très brusque et violent du yakuza, face à la douceur attendue de la princesse dans un monde très codifié. Cela apparaît en outre pour une seconde chance pour le yakuza, alors qu’il était sur le point de mourir assassiné dans son monde. Le manga multiplie ainsi les situations cocasses, parfois drôle, mais dans l’ensemble le titre peine énormément à capter l’attention.

La faute à une narration qui pèche, où tout va très vite et manque de liant, on se sent presque perdu·e·s à certains moments tant le mangaka confond souvent rythme et précipitation. Il y a quelque chose de très dynamique dans la narration certes, mais celle-ci n’arrive pas à cimenter les bases d’une histoire qui pourrait pourtant avoir de bonnes idées. La faute certainement à la volonté de mettre beaucoup de rythme dès lors que le yakuza est transporté dans un autre corps, notamment pour donner ce sentiment de panique en débarquant face à un monde complètement inconnu. Mais cette mise en place de l’univers manque de tact, les idées sont apportées avec de gros sabots et le côté « mafieux » de la personnalité de l’héroïne passe vite à la trappe pour favoriser le développement d’un univers de fantasy tout à fait classique. Il est possible que le manga retombe sur ses pattes dans les prochains tomes, sachant que six sont déjà publiés au Japon, mais il n’y a pour le moment que peu de choses engageantes dans ce premier tome.

De trop rares bonnes idées

On peut lui reconnaître toutefois sa pluralité de personnages qui sont certes introduits rapidement, mais qui apportent une belle diversité de personnalités dans un titre qui devrait beaucoup en profiter. Entre le vieux chevalier prêt à tout pour sauver la princesse et la sorte de servante de cette dernière, le manga tente déjà de reprendre les codes de la fantasy pour les adapter à son humour potache, et le fait même parfois plutôt bien. Ses bonnes idées sont aussi visuelles, avec un style original et plutôt agréable à l’œil, notamment dans la mise en scène des quelques combats avec un rythme intense. Les décors quant à eux manquent de personnalité, tout est plan-plan et finalement trop classique pour pouvoir marquer. Mélanger un ton très yakuza à un univers de fantasy devrait pourtant permettre plus de folies, que ce manga n’assume pas encore entièrement.

Au départ très curieux en découvrant le synopsis de Yakuza Reincarnation, je dois avouer que la lecture a vite fait retomber l’excitation. On peut entrevoir quelques idées certes, mais l’exécution manque de beaucoup trop de choses pour parvenir à capter et à donner envie d’aller plus loin. Ses belles idées visuelles se confrontent à une narration périlleuse, transformant ce tome 1 en grand foutoir au sein duquel on ne sait trop comment réagir. Si le manga parvient parfois à être drôle, il est le plus souvent ennuyant, ayant toutes les peines du monde à amener sa bonne idée initiale au-delà du gimmick propre aux isekai.

  • Le tome 1 de Yakuza Reincarnation est disponible aux éditions Kazé Manga, en librairie depuis le 10 novembre 2021.

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