Persona 5 Strikers est un JRPG développé par Omega Force et P-Studio. Édité par Atlus et Koei Tecmo, le jeu est disponible sur PC, Nintendo Switch et PlayStation 4, à partir du 23 février 2021.
Cette suite de Persona 5 (et non de Persona 5 Royal) nous a gracieusement été envoyée par Koch Media.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, je n’avais jamais approché la licence Persona, avant de m’engager dans la nouvelle aventure de Joker. Le premier opus Revelations : Persona parut sur PlayStation en 1996. Il s’agissait ni plus ni moins du spin-off du jeu Megami Tensei. Aujourd’hui, Persona est composé d’une dizaine de titres principaux ou secondaires, dont Persona 5, arrivé en avril 2017, en Europe. Il permet de suivre les aventures d’un lycéen qui endosse le masque de Joker, dans le Métavers (un monde parallèle). Les événements narrés dans Persona 5 Strikers se situent six mois après l’histoire du premier jeu. Ce nouveau road-trip est tout à fait à la portée des joueurs n’ayant pas fait Persona 5.
Partons en voyage scolaire
Persona 5 Strikers débute pendant les vacances d’été, certes, mais le road-trip est ponctué par un calendrier et des étapes de voyage très formatrices et dépaysantes. S’il fut plaisant de découvrir l’architecture d’Osaka ou de Kyoto, le voyage fit la part belle à l’initiation gastronomique. Persona 5 Strikers donne faim ! Et c’est heureux, car le groupe d’anciens lycéens aura fort besoin d’énergie. Entre deux visites culturelles, ou devrais-je dire culinaires, Joker et ses amis sont amenés à arpenter le Métavers, peuplé de Prisons menaçantes. Leur but ? Venir à bout des ombres, afin de récupérer les Désirs qu’elles ont dérobés aux cœurs meurtris.
Si le jeu est dépaysant, c’est moins grâce à des graphismes plutôt datés qu’à une direction artistique très agréable. L’ergonomie des écrans et menus donne la sensation de tourner les pages de quelque manga, lorsque les cinématiques n’épousent pas le format d’un animé. La bande originale, tantôt pop, tantôt lyrique, donne les pulsations à une mise en scène dynamique, du moins pendant les phases de combat.
En débutant l’aventure, vous vous sentirez pareil à un nouvel étudiant qui découvre une université définitivement trop grande. Si le jeu est dans l’ensemble linéaire, la première partie de Persona 5 Strikers est assez dirigiste, apostrophant régulièrement le joueur avec des didacticiels ou des fenêtres de dialogue intempestives, et ce même lorsqu’on est en train de combattre. De manière générale, il faut s’attendre à un titre très verbeux, dans lequel les choix de dialogue sont plus présents pour maintenir l’attention éveillée que pour proposer la moindre conséquence. Fort heureusement, les nombreuses conversations permettent d’étoffer à la fois l’univers et les personnages, avec une richesse ponctuée de naïveté parfois touchante. Les protagonistes ont beau être des Voleurs Fantômes, ils n’en restent pas moins des jeunes adultes, ayant encore tout à découvrir du monde ou même du genre opposé.
Mais retirons notre casquette d’étudiant, pour endosser le masque de Voleur Fantôme. Joker et ses amis demeurent dans le monde réel afin de cuisiner quelques ramens, quand ils n’enquêtent pas sur les personnes susceptibles de diriger des Prisons, dans le Métavers. La réalité offre la possibilité d’acheter de nouveaux objets et accessoires, mais aussi et surtout de renforcer les liens. Il est essentiel – que dis-je ? crucial – pour les Voleurs Fantômes de consolider leur amitié, avant de partir affronter l’adversité. Des liens relationnels plus étroits permettent de débloquer des points et de nouvelles compétences. Et c’est tout naturel, venant d’un jeu explorant les aléas du cœur humain. Une fois qu’ils sont prêts, Joker et son équipe plongent dans le Métavers, où le gameplay est tout aussi différent que les costumes qu’ils portent.
Le nouveau combat des Voleurs Fantômes
En tant que Voleur Fantôme, vous aurez la possibilité d’arpenter plusieurs Prisons : les différents donjons du jeu. Ces cages spirituelles sont de vrais dédales peuplés d’ombres, où il vous faudra enchaîner les allers et retours, afin de trouver une issue. Si l’exploration alterne entre des phases d’infiltration (et d’embuscades), de plates-formes et de combats, force est de constater que la structure des donjons est répétitive. Rarement un voleur aura été aussi bien guidé. Il s’agira d’aller d’un point A à un point B, pour récolter des objets ou pirater un ordinateur, avant de franchir les portails fraîchement ouverts. Malheureusement, le rare contenu annexe ne rend pas les Prisons plus attrayantes, dans la mesure où il s’agit de Requêtes très dispensables voire rébarbatives, comme livrer tel objet ou affronter un boss déjà vaincu.
Nonobstant, les Prisons se distinguent les unes des autres grâce à leur environnement. Elles possèdent toutes une identité visuelle propre, grâce à la ville dont elles s’inspirent, et surtout la personnalité du Monarque dont elles sont le reflet. Par exemple, la première prison du jeu rend hommage au conte Alice au Pays des Merveilles.
Mais la force de Persona 5 Strikers réside dans la nouveauté de son système de combat. Les Voleurs Fantômes n’attendent plus sagement leur tour pour combattre leurs ennemis. Les confrontations sont en temps réel et, il faut le dire, très dynamiques. Vous aurez la possibilité d’incarner n’importe quel membre de l’équipe afin de donner l’assaut, au sein de combats virevoltants et épiques, compte tenu du nombre très impressionnant d’ennemis. Alternant entre les attaques à distance et le combat rapproché, les Voleurs Fantômes ont la possibilité d’interagir avec l’environnement, ou entre eux, afin de mener des attaques spéciales contre leurs assaillants. Vous pourrez par ailleurs invoquer des Personae, lesquelles disposent de compétences offensives ou défensives. Vous aurez tout le loisir d’améliorer voire de fusionner vos Personae, afin de pimenter les stratégies.
D’aucuns trouveront les combats parfois confus, voire exigeants, mais Persona 5 Strikers dispose de plusieurs modes de difficulté qui devraient contenter les joueurs chevronnés, comme les non-initiés. Dans tous les cas, les combats restent en mémoire grâce à leur dimension psychologique. Les Voleurs Fantômes ne peuvent pas affronter un boss avant d’avoir découvert le traumatisme qui l’a perverti. De simples étudiants, à Voleurs Fantômes, nos héros deviennent aussi de fins psychologues et humanistes.
L’intrigue de Persona 5 Strikers met du temps à décoller et les donjons ne sont pas toujours passionnants. Cela n’empêche pas le scénario et les Prisons de se complexifier, au point d’avoir un véritable intérêt narratif. Oui, l’histoire a du suspense et peut se montrer riche en rebondissements. Mais au-delà de l’amitié attachante entre les jeunes adultes et du périple costaud des Voleurs Fantômes, le jeu charme par la force des thématiques abordées.
L’humaniste en chacun de nous
Persona 5 Strikers possède un univers très riche grâce à la multiplicité de ses genres. L’intrigue oscille entre le road-trip initiatique, l’enquête policière, les combats acharnés et la dimension psychique, avec une fluidité déconcertante. Le Métavers est un monde parallèle qui reflète, de manière métaphorique, de sinistres réalités. Ainsi, les ombres menaçant nos héros ne représentent que la partie confinée du subconscient. La Prison de chaque Monarque est l’incarnation d’esprits tortionnaires, mais aussi torturés. Corrompus par les sept péchés capitaux, les différents boss du jeu échappent cependant à toute forme de manichéisme. Comme mentionné plus haut, les Voleurs Fantômes cherchent à découvrir le traumatisme de chaque cœur meurtri, avant de l’affronter. Ni juges, ni bourreaux, ces braqueurs de cœurs s’avèrent indulgents et clament une véritable ode à la rédemption. Des malfaiteurs bienfaisants. Ce n’est pas un hasard si l’une des Personae du jeu est nommée Valjean. Plus que des voleurs, Joker et ses amis sont des reconstructeurs de cœurs. Cela passe par l’opportunité d’une seconde chance, ou l’apprentissage de l’humanité (auprès d’un personnage inédit et très important, dans cet opus).
Le développement des personnages est particulièrement soigné dans ce road-trip virevoltant entre les liens amicaux, familiaux et rivaux. La déchéance d’un boss s’accompagne généralement du développement parallèle d’un des membres de l’équipe. Bien souvent, les Voleurs Fantômes réalisent qu’ils ne sont pas si différents de leurs adversaires, et qu’il ne tient qu’à eux de ne pas basculer. A cela s’ajoutent des sujets de société et des thématiques assez matures, lesquels trouvent leur apogée dans une véritable critique de l’addiction technologique qui, loin de resserrer les liens sociaux, clive les gens. Mais il est difficile d’en dire davantage sans spoiler des éléments cruciaux de l’intrigue.
Une chose est certaine, en dépit de son caractère répétitif, Persona 5 Strikers maintient l’attention en jalonnant son intrigue de surprises, jusqu’à un dénouement significatif, et en faisant appel à l’humaniste qui réside en chacun de nous.
Épilogue
Si vous vous sentez l’âme d’un lycéen, sans pour autant avoir envie de reprendre les cours, lancez-vous dans le road-trip proposé par Persona 5 Strikers. Au cours de votre exploration des différentes villes du Japon, vous serez amenés à déguster une multitude de saveurs culinaires, pour mieux renforcer vos liens et vous armer contre le Métavers. Il ne vous restera plus qu’à endosser votre masque de Voleur Fantôme afin d’affronter une quantité gargantuesque d’ennemis dans des combats en temps réel ultra dynamiques. Une ombre subsiste au tableau, et pas des moindres : plusieurs donjons du jeu s’avèrent répétitifs, sans parler de quêtes annexes anecdotiques et franchement dispensables. Tantôt très verbeux, tantôt très nerveux, Persona 5 Strikers mettra tout le monde d’accord grâce à la richesse de son écriture et des thématiques abordées. Les différentes palettes du cœur ont rarement été aussi bien explorées.
- Persona 5 Strikers sort le 23 février 2021, sur PC, Nintendo Switch et PlayStation 4.