Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours été fan de Pokémon. Ma passion pour les monstres de poche débuta à la fin des années 90, tandis que je vivais ma première épopée vidéoludique sur Pokémon version Jaune ; l’anime et les différents produits dérivés n’étant bien sûr pas en reste. En grandissant, je finis toutefois par me détourner de la franchise. Si je ne peux plus poser un regard expert sur elle, cela me permet peut-être de garder un peu d’objectivité. Mes dernières aventures Pokémon, sur Nintendo Switch, m’ont laissé des souvenirs très hétéroclites. Après avoir passé un excellent moment sur Pokémon Epée et Bouclier, je n’en garde finalement pas un souvenir impérissable. Je me suis terriblement ennuyée sur le remake de Perle et Diamant tandis que, contre toute attente, New Pokémon Snap m’a captivée. Le dernier né de Game Freak et The Pokemon Company est un cas particulier car il était extrêmement attendu par les fans. Sorti le 28 janvier dernier, Légendes Pokémon : Arceus devait incarner le renouveau tant espéré de la saga ! Pour ce faire, le nouvel opus décide paradoxalement de nous transporter au sein des origines du folklore, dans une région inspirée du Japon féodal. Malheureusement, Game Freak a trop pris cette ambiance médiévale au mot, en proposant un rendu visuel résolument archaïque ! Les graphismes de Pokémon : Arceus ont fait couler beaucoup d’encre. Pourtant, il ne s’agit pas des réels défauts du jeu qui, quoi qu’on en dise, regorge de qualités.
Cette chronique a été rédigée suite à l’acquisition du jeu par nos soins.
Un jeu Pokémon légendaire
Les jeux Pokémon se sont toujours déroulés dans des univers contemporains voire futuristes. Ce n’est pas le cas d’Arceus qui nous plonge dans la région de Sinnoh alors qu’elle s’appelait encore Hisui. C’est à Sinnoh que se déroulaient les péripéties de Pokémon Perle et Diamant. De fait, certains environnements de la map vous seront familiers, à commencer par le légendaire Mont Couronné. Vous retrouverez aussi un nom délicieusement utilisé à contre-emploi, puisque vous serez amené(e)s à intégrer le Groupe Galaxie, (à ne pas confondre avec la Team Galaxie de Perle et Diamant !) On peut supposer que l’institution a mal tourné, au fil des siècles, ou qu’Hélio, le leader de la Team Galaxie, s’est tout simplement inspiré de l’Histoire de la région pour baptiser son équipe. Dans la mesure où Pokémon : Arceus raconte les origines de la saga, la région d’Hisui s’inspire du Japon féodal, comme en témoignent certaines tenues vestimentaires ou la nouvelle hiérarchie des Pokémon. Chaque zone de la région est gouvernée par un Pokémon Monarque, aux dimensions gargantuesques. Il est également possible de rencontrer des Pokémon Barons, plus grands que la moyenne, et dotés de yeux rouges. Enfin, les Pokémon ordinaires déambulent ici et là sur la map. Il s’agit d’un système résolument féodal, auquel s’ajoutent des formes régionales appropriées, à commencer par Voltorbe, ressemblant désormais à une Pokéball artisanale en bois.
Quant à vous, vous ferez vos premiers pas à Rusti-Cité, laquelle porte bien son nom, certes, mais sert aussi et surtout de quartier général au Groupe Galaxie. C’est ici que vous pourrez vous reposer, trier vos Pokémon (non pas dans un PC mais dans un pâturage), faire des achats et plus encore. Après avoir intégré le Corps des Chercheurs, votre mission consistera à compléter le tout premier Pokédex. Pour ce faire, il ne faudra pas attraper un seul membre de chaque espèce, mais plusieurs individus, afin d’établir des moyennes. Un certain nombre de tâches seront à accomplir afin de compléter la page de chaque créature. Si cette mission quasiment divine vous a été confiée par Arceus, il s’agit aussi d’un moyen de familiariser les humains avec les Pokémon, dans un monde où ces créatures sont encore méconnues et craintes. L’harmonie entre les espèces est d’autant plus fragile qu’une étrange faille spatio-temporelle modifie le comportement des Pokémon Monarques, au risque de provoquer des catastrophes…
Des graphismes Bulbizarres ?
En s’inspirant du Japon féodal, Pokémon : Arceus propose des idées à la fois innovantes et intéressantes. Ce qui n’était certes pas une raison pour employer des graphismes aussi archaïques. Le sujet a fait particulièrement polémique, bien que les jeux Pokémon n’aient jamais brillé pour leur beauté technique. A tort ou à raison, Arceus est généralement comparé à Breath of the Wild, le célèbre épisode de Zelda, sorti cinq ans plus tôt. A bien des égards, Légendes Pokémon s’en inspire et ne s’en cache pas, sans pour autant égaler sa richesse ni sa beauté. Il me serait difficile de nier les défauts techniques d’Arceus, qu’il s’agisse de la grossièreté des textures, du clipping intempestif ou des contours baveux dès lors que l’on se trouve sur l’eau ou dans des environnements sombres, comme les grottes. Il n’est toutefois pas dans mes coutumes de juger un jeu à ses seuls graphismes, sans compter que je suis sans doute fatiguée que le moindre RPG ou Open-World soit désormais comparé à Breath of the Wild. Passons.
D’après jeuxvideo.com, Pokémon : Arceus a été victime de contraintes de développement qui expliquent le rendu visuel final, (faute de l’excuser). Seulement 167 personnes auraient été employées pour travailler sur Légendes Pokémon, au cours d’un délai de deux ans. A titre comparatif, entre 100 et 300 personnes travaillaient sur Breath of the Wild et par-dessus tout, elles disposaient d’un délai de cinq ans. En de telles circonstances, il est bien naturel que Pokémon : Arceus ait ce rendu, bien qu’on puisse en vouloir à The Pokemon Company ou Nintendo, malgré tout. Si Pokémon est la franchise la plus rentable de l’histoire, c’est précisément ce qui met des bâtons dans les roues du développement des jeux. En raison de la fréquence de leur sortie, aucun jeu Pokémon ne peut être reporté, d’autant plus que cela s’accompagne de l’arrivée de nombreux produits dérivés, à commencer par l’anime. Comme nous le disions il y a longtemps, lors d’un Podcast, les jeux vidéo Pokémon ne sont malheureusement qu’un élément parmi d’autres, au sein de tous les produits et médias constituant l’univers de la franchise. Au reste, les problèmes graphiques ne sont – à mon sens – pas les véritables défauts du jeu.
Des problèmes Déflaisants
Tout d’abord, je m’interroge sur l’utilité d’avoir sorti le Remake de Diamant et Perle, quelques mois plus tôt. Si l’on passe outre l’intérêt de (re)découvrir la région de Sinnoh avant Pokémon : Arceus, ou encore des motivations purement pécuniaires ; le jeu était si fade qu’il devenait rapidement ennuyeux. Par-dessus tout, je considère Arceus comme une réécriture – certes libre – de l’histoire de Diamant et Perle. L’ascension du Mont Couronné, la rivalité entre les Pokémon Dialga et Pialka sont assez revisitées pour rester divertissantes, mais inspirent une impression de déjà-vu, à peine deux mois après la sortie du remake mentionné. Ensuite, Pokémon : Arceus possède des défauts que d’aucuns jugeront inhérents aux RPG. S’il est appréciable que des quêtes annexes viennent vivifier la région d’Hisui, la plupart sont inintéressantes voire répétitives. Le sacro-saint rythme ternaire des quêtes vous poussera à chercher au moins trois endroits, à Rusti-Cité, pour suspendre le Pokémon carillon Eoko ; tout cela pour finir par le ramener à sa place initiale !
Enfin, si la plupart des joueurs et joueuses ne se plaindront pas que la difficulté ait été rehaussée ; je n’ai pas toujours trouvé les combats équilibrés. Votre compagnon peut régulièrement se retrouver cerné par plusieurs Pokémon sauvages. Vous n’êtes jamais à l’abri d’un one-shot ou du Style Rapide d’une capacité, permettant à un combattant d’attaquer plusieurs fois d’affilée. Or, bien qu’il existe de nombreuses manières de faire gagner de l’expérience à vos acolytes, les combats ne sont pas si nombreux, au cours de l’histoire principale. Ceci entraîne un pic de difficulté lorsque l’intrigue devient plus linéaire et jonchée de duels, lors du dernier arc puis durant le Post-Game. Aussi aurait-il été pertinent que les affrontements contre les Pokémon Monarques soient de réels combats plutôt qu’une étrange corrida, durant laquelle le dresseur (ou la dresseuse) doit lancer des sacs sur la créature, tout en évitant ses attaques !
Un jeu Ludicolo
En dépit de ses défauts, Légendes Pokémon : Arceus est un bon jeu, que je ne saurais que trop vous conseiller. Si l’on considère que les objectifs principaux d’un jeu vidéo sont l’évasion et le divertissement, ce nouvel opus est clairement à la hauteur. Beaucoup diront que l’un de leurs rêves d’enfance a été maladroitement mais malgré tout concrétisé. A défaut de pouvoir véritablement parler d’Open-World, Pokémon : Arceus est constitué de zones semi-ouvertes, dans lesquelles nous partons en excursions. Chaque zone possède un climat, des couleurs et des Pokémon différents. Il s’agit d’écosystèmes distincts, que l’on se plaît à découvrir et à arpenter, afin de compléter le Pokédex. Cela est d’autant plus plaisant que plusieurs Montures Pokémon viennent faciliter les voyages. Si Cerbyllin (la nouvelle évolution de Cerfrousse) permet de courir à travers les plaines, Farfurex a la faculté d’escalader les falaises. J’ai rarement éprouvé un tel sentiment de liberté, de quiétude (notamment grâce à la musique) et même d’addiction lorsque j’attrapais des Pokémon.
Les graphismes sont beaucoup décriés, et pourtant, les créatures sont plus jolies qu’avant. Chaque espèce progresse de manière différente sur la map. Si certains Pokémon inoffensifs ne réagissent guère à votre approche, d’autres plus craintifs s’enfuient. C’est pourquoi il vous incombe d’être discrets avant de leur lancer une Pokéball. D’autres espèces sont agressives et il devient impératif de les vaincre, afin de les attraper. Bien que les combats soient au tour par tour, ils sont plus dynamiques. Les animations des attaques, sans êtres révolutionnaires, ont enfin été retravaillées. La chasse de Pokémon est d’autant plus grisante qu’il devient nécessaire d’attraper plusieurs membres de l’espèce ou d’accomplir des tâches spécifiques, comme les nourrir ou assister à certaines attaques, pour remplir les pages du Pokédex et vraiment les connaître. Dans la mesure où les Pokémon ne surgissent plus de manière aléatoire et imprévisible dans les hautes herbes ; il est sincèrement plaisant de se rendre sur leurs territoires respectifs afin de les observer et de les attraper. Mais tout cela est également possible grâce à la confection d’objets. Au cours de cette aventure, vous aurez besoin de beaucoup plus de Pokéballs qu’avant. Par chance, vous pourrez désormais les fabriquer. Un dernier mot sur la Shasse, peut-être. S’il n’est pas dans mes habitudes de traquer les Pokémon Shiny (ou chromatiques), il s’agit d’une activité très populaire parmi les fans. Il semblerait que la Shasse soit désormais plus agréable, notamment grâce au système d’apparitions massives.
En deux mots (et sans mauvais jeu de mots)
Légendes Pokémon : Arceus est un préquel dans la mesure où l’intrigue se déroule à Huisi, qui ne portera que plus tard le nom de Sinnoh. Le jeu est très dépaysant puisqu’il s’inspire de façon discrète, mais pertinente, du Japon féodal. Ce nouvel opus a été fort critiqué en raison d’une technique et de graphismes datés, voire ratés. Si on ne peut décemment les nier ou les excuser, ceci est expliqué par le peu de moyens humains ou de temps investi dans la conception du jeu. Pourtant, les réels défauts sont tout autres, à commencer par des combats pas toujours équilibrés. En dépit de cela, Légendes Pokémon : Arceus est un jeu extrêmement divertissant, dans lequel il est fort plaisant de voyager et surtout de partir à la rencontre de ces très chers Pokémon. Je conçois tout à fait qu’Arceus puisse décevoir. Je ne suis moi-même pas totalement convaincue. Mais force est de constater qu’il me donne énormément d’espoir pour l’avenir de cette franchise que j’affectionne tant.
- Légendes Pokémon : Arceus est disponible sur Nintendo Switch depuis le 28 janvier 2022.