La Hyène, la Sorcière et le Garde-manger | Long Live The Queer

by Aleksseli

Après avoir mis en lumière l’été dernier le très beau Lever de Soleil, on vous parle aujourd’hui de La Hyène, la Sorcière et le Garde-manger, un autre livre de chez YBY, excellente maison d’édition publiant de la littérature inclusive et prônant la diversité sous toutes ses formes (pour en savoir plus vous pouvez découvrir l’épisode de Chill Chat qui lui est dédié).

Critique écrite suite à l’envoi d’un exemplaire du livre par l’éditeur

Dans le lointain royaume de Rosevelle, Gertrude est une princesse aux cheveux violets, et ce n’est pas leur couleur naturelle. Alors que ses sœurs se consacrent à la poésie, la peinture ou encore aux soupirs qu’elles poussent pour des jouvenceaux aux frais minois, Gert, comme elle préfère qu’on la nomme, est plutôt du genre à faire le mur pour aller ripailler avec le peuple aux rythmes des chansons endiablées de son groupe de ménestrelles favori ou encore s’encanailler en secret avec la jeune femme pour qui son cœur fait du tamtam et qui, accessoirement, est sa camériste. Mais Gert a un problème : Corvinia de Maleganza, seconde épouse du roi et forcément sorcière maléfique selon la princesse rebelle. Pour Gert, il est donc l’heure d’entrer en résistance et de déjouer les sinistres desseins de cette ténébreuse belle-mère. À ses risques et périls.

Avec son titre pas piqué des hannetons, La Hyène, la Sorcière et le Garde-manger pourrait faire croire à un pastiche. Il n’en est rien. Au lieu de tomber dans la caricature facile, Aeph, auteur de cette novella rock and roll illustrée par Codaleia (dont on conseille le compte instagram, notamment si vous êtes fan de Star Wars), nous mitonne ici un véritable conte truffé d’humour, d’amour pour les bons mots et de personnages qui ont du répondant.

En mariant le style et le vocabulaire des contes classiques avec une écriture plus moderne, dynamique et avec par moment une pincée de langage familier pour donner juste ce qu’il faut de piquant, Aeph nous emporte sans peine dans ce royaume où les princesses ne rêvent pas toutes de princes et où les bons plats peuvent révéler bien des surprises. Je ne vais évidemment pas en gâcher ici la saveur en dévoilant plus de choses qu’il n’en faut, préférant laisser les joies de la découverte aux lecteur·ice·s qui s’aventureront à Rosevelle.

Il me faut par contre mettre en lumière la galerie de personnages bien croqués auxquels on s’attache très vite ; probablement parce qu’on peut très facilement ressentir tout le plaisir qu’a l’auteur à les faire vivre. Gert est forcément au centre de l’histoire et son dynamisme et sa faconde sont un des moteurs du récit, mais les personnages qui l’entourent ne sont pas en reste. Tout ce petit monde évolue avec naturel et propose des passages qui vont du monologue introspectif au dialogue vaudevillesque (je pense notamment à une scène de cour absolument hilarante).

Et si le conte proposé est gentiment barré, il n’en oublie jamais de diffuser ses messages. Que ce soit sur la liberté d’être qui l’on est, d’aimer qui l’on veut, ou encore le questionnement sur la différence de classe sociale mais aussi sur les étiquettes qu’on colle sur les gens suivant leur apparence et les préjugés qui en découlent. Ces messages sont infusés dans le texte mais jamais martelés.

Tous ces ingrédients font de La Hyène, la Sorcière et le Garde-manger une œuvre qu’on prend plaisir à dévorer, une œuvre pleine de vitalité et de bienveillance dans la lignée de séries d’animation comme The Owl House ou Tangled, et l’on serait même un peu triste de quitter si rapidement la table de Gert et le royaume de Rosevelle.

Allez, Aeph, du rab s’il vous plaît ! Car, oui, avec de pareils mets, nous sommes toustes des glouton·ne·s.

  • La Hyène, la Sorcière et le Garde-manger de Aeph, illustré par Codaleia est disponible aux éditions YBY.

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