Demon Slave – Tome 2 | Fétichisme monstrueux

by Anthony F.

On découvrait Demon Slave en mars dernier, un manga atypique malgré son approche shōnen très classique, avec ses combattantes dans un monde alternatif qui réduisaient en esclavage un jeune homme pour gagner en puissance. Flirtant avec l’ecchi, le manga tirait son originalité de sa manière d’aborder la domination et plus généralement, le fétichisme, dans un monde où les hommes sont relégués au second plan.

Cet article a été rédigé suite à l’envoi d’un exemplaire par l’éditeur.

De nouvelles maîtresses

Comme souvent avec les shōnen, le deuxième tome est le moment de poser les enjeux et de découvrir de nouvelles menaces. Demon Slave n’échappe pas à la règle, puisque après avoir posé son étrange univers dans le premier tome, cette suite nous mène face à une menace inattendue qui va constituer un nouvel objectif à atteindre pour notre héros. Mais comme le manga de Takahiro a cette petite surcouche qui aborde le fétichisme et les dominatrices, c’est l’occasion pour le héros de se découvrir une nouvelle maîtresse un peu malgré lui. Il y a évidemment un aspect séducteur, nécessairement osé, on n’est définitivement pas face à un titre qui s’adresse aux plus jeunes et c’est bien confirmé par cette suite. Si le premier tome était plus sage, le deuxième tome va dans le vif du sujet et n’hésite jamais à parler frontalement du fétichisme. Cela se fait plutôt habilement au travers des désirs du héros, qui se matérialisent dans la récompense qu’il obtient lorsqu’il a bien fait son job d’esclave. Ses maîtresses doivent effectivement le récompenser après une bonne bataille, en le gratifiant de la réalisation de l’un de ses désirs enfouis. Alors c’est souvent graveleux, mais l’auteur trouve un équilibre plutôt intéressant entre ces séquences et des batailles qui lorgnent plus du côté des shōnen les plus classiques. D’autant plus que sa galerie de personnages fonctionne bien, si le héros n’est pas bien captivant, les héroïnes sont parfois surprenantes et se dévoilent peu à peu avec des histoires qui leur donnent une certaine consistance.

Néanmoins on reste face à un manga qui prend son temps, l’univers des monstres où évolue la petite troupe reste tout particulièrement énigmatique et on n’apprend que peu de choses sur ce deuxième tome. La découverte de la nouvelle menace apporte une nouvelle dynamique à l’action, mais c’est un tome qui prend plutôt le temps de s’intéresser à un personnage qui était effacé au tout début. On en apprend juste un peu plus sur les autres escadrons qui peuplent le monde alternatif où les guerres contre les monstres font rage, et c’est pour le moment à peu près tout. Heureusement, il y a toujours des dialogues plutôt bien sentis qui permettent d’éclairer sur la situation et sur la cohabitation difficile entre les personnages, ce qui permet d’éviter le train-train des sorties en chasse de l’escadron. D’ailleurs, ce deuxième tome est plutôt pauvre en scènes d’action, et ce n’est peut-être pas plus mal pour un titre qui a encore besoin de placer ses nombreux personnages.

L’auto-dérision de tous les instants

L’humour est évidemment omniprésent, souvent grinçant en ridiculisant le personnage masculin, ses désirs et aspirations : on reste toujours sur ce monde résolument féminin où l’on rappelle à l’homme qu’il doit rester à sa place. Car si vous n’avez pas encore eu la chance de lire le premier tome, Demon Slave raconte un monde où le patriarcat a été réduit à néant avec une prise de pouvoir par les femmes. La raison est simple : elles sont les seules à pouvoir affronter les monstres qui tentent d’envahir la Terre. Alors les hommes ont perdu les places de dominants, et notre héros se retrouvait même réduit en esclavage car il pouvait permettre à l’une des combattantes de démultiplier sa puissance. Ce renversement est toujours efficacement mené, même si on sent que l’œuvre s’éloigne du propos quasi-féministe du premier tome : il y a cette fois-ci beaucoup plus de nudité, avec un « fan service » très présent (entre les culottes sous les jupes et la nudité dans les onsen) où les « maîtresses » finissent presque par être soumises au personnage masculin. Néanmoins cela fonctionne toujours plutôt bien, d’autant plus que l’humour permet de contrebalancer ces séquences et souvent les tourner en dérision afin d’éviter de devenir trop lourd.

Surprenant ou non, ce deuxième tome a le mérite d’affirmer pleinement le ton à attendre pour la suite du manga. Moins engagé que ses débuts mais peut-être plus drôle, Demon Slave trouve sa dynamique et y va tout droit sans se poser de question. Radical mais bien mené, le manga parvient à parler de fétichisme en faisant rire, le tout sous l’angle d’un shōnen plus classique avec son héros qui découvre sa force peu à peu, assumant doucement son rôle d’élu et de pièce indispensable à la sauvegarde de son monde. Ce n’est pas un grand manga, mais on passe un bon moment en le lisant.

  • Le tome 2 de Demon Slave est sorti le 8 avril 2021 aux éditions Kurokawa.

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